Au cours de l’année écoulée, j’ai évalué plus de 1 300 vins du millésime 2016 de Bordeaux et cinq seulement ont obtenu la note de 100 points. La perfection. Chez Wine Enthusiast, nous l’appelons «classique». Des vins qui chantent. Ils venaient de tout Bordeaux, toujours le signe d’un grand millésime. Cela se produit-il chaque année? Certainement pas. En 2015, par exemple, il y avait cinq vins à 100 points, mais provenant de producteurs différents de ceux ayant obtenu le meilleur score en 2016. Contrairement aux spiritueux, l’un des grands avantages du vin est que les millésimes ne sont pas les mêmes et les scores en témoignent.
Au cours des 20 dernières années, quatre domaines seulement ont marqué 100 points plus d’une fois et il n’est pas limité aux châteaux de la Première croissance: Cheval Blanc (2010, 2015); Haut-Brion (blanc 2014, rouge 2016); Lafite Rothschild (2010, 2015); et Pétrus (2005, 2015). Les 2015 riches et ouvertes contrastaient réellement avec les 2016 beaucoup plus fermes et fermées. La qualité des deux millésimes n’est pas en cause. C’est que les différences sont si marquées et si fascinantes pour les amateurs de vin rouge.
La catégorie 2015 est «un millésime méditerranéen, abordable, chaleureux et rond», explique Dany Rolland, vigneron, partenaire commercial et épouse du consultant Michel Rolland. « [L’année] 2016 est un océan vintage, plus classique que Bordeaux, avec beaucoup de tanins et de structure. » À son avis, les deux millésimes vieilliront également. Pour ceux qui suivent les millésimes bordelais, prenez le temps de réfléchir aux années 2009 et 2010: le millésime 2009 a été un succès immédiat, en particulier chez les buveurs de vin américains. C’était doux, opulent et facile à comprendre quand il était jeune. D’autre part, le millésime 2010 était grand, plein d’alcool et de tanins, et réglé sur le long terme. À Bordeaux, les vignerons et les pacesetters ont préféré les vins de 2010.
En comparant 2015 et 2016, le verdict n’est pas aussi clair. Les vins de 2015 sont plus attrayants dans leur jeunesse, affichant un noyau de tanin équilibré par la fraîcheur. Cependant, le millésime 2016 prendra peut-être du temps à atteindre son véritable potentiel. Ce qui rend le millésime 2016 si spécial, c’est la qualité dans la hiérarchie bordelaise. Le même caractère que l’on retrouve dans les vins les plus complexes apparaît également dans les options les plus simples. Ils offrent tous des bouteilles avec des fruits riches et mûrs et une structure tannique qui promet la longévité.
«Les tanins sont extraordinaires, raffinés et sophistiqués», déclare Thomas Duroux, PDG de Château Palmer à Margaux. Véronique Sanders, directrice générale du Château Haut-Bailly à Pessac-Léognan, a comparé les tanins à «une caresse». «Le vin est mûr et énergique», explique Hubert de Bouärd, dont la famille est propriétaire du Château Angélus à Saint-Émilion.